Libertines, The

The Libertines

      

 The Libertines                                   Up The Bracket

  10/10                                                  10/10

 

Alors que le monde entier tremblait sous les guitares des Strokes, les radios anglaises nous dénichèrent le nouveau soit-disant meilleur groupe du monde entier capable de montrer à ses roquets d'Américains que les Anglais aussi savent faire du bon rock. Ce groupe : c'était les Libertines, et pour une fois les radios avaient bien raison !

 

Carl Barât et Pete Doherty, les deux leaders du groupe (rejoints rapidement par le bassiste John Hassal et le batteur Gary Powell) nous gratifièrent d'un premier single jouissif : What A Waster. Le vieil adage sex, drugs & rock'n'roll revint à la mode. Les Libertines ne se limitaient pas  à un groupe de punk/garage rock, c'étaient aussi, comme l'a dit Andrew Loog Oldham (manager des Rolling Stones), un style de vie à part entière. Barât et Doherty faisaient en effet la une de la presse people pour leurs nombreuses frasques résolument rock'n'roll : possessions de drogues illégales, foutage de merde dans le métro, braquages à main armée (entre membres du groupe !) et j'en passe et des meilleures.

 

Le talent du groupe fut confirmé par leur deuxième single, l'excellent (culte ?) Don't Look Back Into The Sun.

 

Vint ensuite l'accouchement d'Up The Bracket, album sooo British rempli de bonnes références : on pense aux Clash (l'album est d'ailleurs produit par Mick Jones ancien guitariste du groupe mythique), aux Jams, mais aussi Kinks et aux Smiths pour le brin de finesse nécessaire. On ressent  une grande urgence punk sur chaque morceau de la part d'un groupe qui donne l'impression de jouer sa vie sur chaque piste (le nerveux Horrorshow en est l'exemple parfait, aussi bien pour ses guitares nerveuses équilibristes que pour ses paroles dérangées « I've been following / Your minds instructions / Oh how just to slowly, sharply screw myself to death / Ah yes, there is a screw / It's pointed at my head »). Aucune piste n'est a jeter sur ce qui est sans aucun doute le meilleur album de 2002. Du morceau d'ouverture groovy, Vertigo, aux dernières notes du carpe-diemiste Good Old Days, en passant par le single (un de plus !) Time For Heroes, le très posé Tell The King, et Up The Bracket (le morceau qui illustre le mieux la Libertines-attitude par ses guitares et ses paroles d'Anglais morveux à tendences hooligans), on ne peut qu'être frappé des grandes qualités de songwriting de Doherty et Barât. Les critiques furent élogieuses (les Libertines furent élus Nouveau Meilleur Groupe lors des NME Awards) et le public se prit au jeu.

 

C'est alors que les problèmes commencèrent à affluer, catalysés par un Pete Doherty de plus en plus incontrolable. Il fit faux pas au groupe, les laissant continuer une tournée européenne marathon sans lui, alors qu'il montait tranquillement son petit groupe annexe : les Babyshambles. Le mois suivant, tandis que les Libertines jouaient au Japon, il fut arrêté en train de cambrioler l'appartement de son collègue, Carl Barât. Dans la foulée, Doherty fut ensuite condamné à 6 mois de prison ferme pour possession de cocaïne et d'heroïn (encore un qui a trop écouté le Velvet Underground...).

 

En 2004, pendant un concert à la très honorable Brixton Academy, Doherty fracassa sa guitare et quitta la scène en plein milieu du show. Les tensions devinrent de plus en plus vives entre les deux frontmen... On pense alors aux différents opposants Brian Eno et Bryan Ferry, de Roxy Music.

 

Quand Barât et Doherty purent enfin se supporter à nouveau, ils décidèrent d'enregistrer un deuxième album, sortit en août 2004 (des vigiles furent néanmoins nécessaires pour séparer les deux hommes prêts à s'étrangler entre chaque prise). The Libertines, album éponyme, porte son nom à merveille et ne traduit pas, comme certaines mauvaises langues ont pu le dire, un certain manque d'inspiration. The Libertines est en effet un album quasi-autobiographique où les Anglais nous parlent de leur vie, de leurs problèmes et des rivalités entre les deux chanteurs. Dès la première piste, l'auditeur est conscient d'écouter le dernier album de ces gars là... Le titre de celle-ci, Can't Stand Me Now, est assez explicite et ses paroles font directement référence aux sources du malaise opposant Barât et Doherty : « An ending fitting for the start / you twist and tore our love apart / your light fingers through the dark / that shattered the lamp and into the darkness cast us... ». D'autres morceaux, comme The Saga (qui fait directement chanter Doherty à propos de ces problèmes de drogue qu'il refuse d'admettre) et What Became Of The Likely Lads ne laissent plus l'ombre d'un doute quant à la mort annoncée du groupe. Mais il serait bien trop réducteur de ne retenir  que le venin de cet album au cool désinvolte, à la désinvolture cool. Certains diront que ce disque est moins péchu que le précèdent, mais c'est juste qu'il est moins brouillon, plus aboutti, et se révèle véritablement après plusieurs écoutes. Des classiques instantanés sautent aux yeux, comme le magistral Road To Ruin (et sa piste d'orgue qui s'accorde parfaitement au style du groupe) ou le sardonique Arbeit Macht Frei. The Libertines est une sorte de Hara-Kiri rock'n'roll qui transporte l'auditeur au pays joyeux des Pete et des Carl, un monde brut et décomplexé où l'on vit au jour le jour car on sait bien que la mort approche à chaque instant.

 

Un semblant de tournée fit suite à cet album, comprenant seulement quelques rares concerts avec un Doherty le plus souvent écarté du groupe jusqu'à ce qu'il résolve ses problèmes de drogue, remplacé par Anthony Rossamando. Doherty put alors se consacrer à part entière à son nouveau groupe, les Babyshambles, et sortit un single (Killamangiro) qui rentra immédiatement dans le top 10 des charts au Royaume-Uni. Un album parut en octobre 2005, Down in Albion, à l'inspiration plus mélodique que les Libertines. Pour la petite anecdote, Doherty est aujourd'hui habillé pour ses apparitions publiques par le grand couturier Slimane...

 

De son côté, Carl Barât réunit autours de lui Gary Powell, Anthony Rossamando et Didz Hammond (respectivement batteur, guitariste remplaçant des Libertines, et bassiste de The Cooper Temple Clause) pour former les Dirty Pretty Things, groupe au son garage/punk dont on attend un album dans le courant de l'année.                                                                        

 

                                              

Ps : merci à Gauthier pour ce magnifique article ! ;-)

 




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